Dans l’affaire opposant Ranarison Tsilavo, directeur exécutif de CONNECTIC, à Solo, gérant majoritaire de la société, des virements bancaires d’un montant total de 1.047.060 euros (soit 3,6 milliards d’ariary) ont été transférés à la société française Emergent Network Systems entre 2009 et 2012.
Ranarison Tsilavo, plaignant dans cette affaire, a accusé Solo d’avoir effectué ces virements « sans contrepartie », causant un préjudice à CONNECTIC. Cependant, les faits révèlent une réalité différente : Ranarison Tsilavo a signé l’ensemble des virements et a établi les factures qui les accompagnaient.
Au-delà de ces contradictions, une analyse juridique approfondie montre que CONNECTIC est la véritable victime de ces virements, et non Ranarison Tsilavo en tant qu’associé. Pourtant, les intérêts civils ont été attribués exclusivement à Ranarison, excluant à la fois CONNECTIC et Solo. Cette décision mérite un examen approfondi.
Les Responsabilités de Ranarison Tsilavo : Signataire et Émetteur des Factures
Signataire des virements
Tous les virements envoyés de CONNECTIC à Emergent Network Systems ont été signés par Ranarison Tsilavo en tant que directeur exécutif. Son rôle imposait de :
- Vérifier la légitimité des transferts.
- S’assurer de l’existence de contreparties justifiées (prestations, livraisons, etc.) avant de donner son autorisation.
Émetteur des factures
En plus de signer les virements, Ranarison Tsilavo a également établi les factures qui accompagnaient ces transferts. Ces documents, censés justifier les virements, portent directement sa signature et son approbation explicite.
Questions importantes :
- Si les virements étaient réellement « sans contrepartie », pourquoi Ranarison a-t-il signé et accompagné ces virements de factures ?
- Pourquoi n’a-t-il soulevé aucune objection lors de la validation des comptes de CONNECTIC, qu’il a approuvés pour les exercices 2009 à 2011 ?
- Pourquoi a-t-il attendu 2015 pour déposer une plainte, alors qu’il était directement impliqué dans ces transactions ?
L’Article 6 du Code de Procédure Pénale Malgache : Une Réparation Mal Orientée
L’article 6 du Code de procédure pénale malgache stipule :
« L’action civile en réparation du dommage causé par un crime, un délit ou une contravention appartient à tous ceux qui ont personnellement souffert du dommage directement causé par l’infraction. »
Application dans l’affaire CONNECTIC
Pour prétendre à des intérêts civils, une personne doit prouver qu’elle a subi un préjudice direct et personnel.
- Le préjudice direct concerne les fonds de CONNECTIC. C’est donc CONNECTIC, et non Ranarison Tsilavo, qui subit une perte directe liée aux virements.
- Le préjudice de Ranarison Tsilavo est indirect. En tant qu’associé détenant 20 % des parts, il pourrait invoquer des pertes financières indirectes (dividendes ou valeur des parts), mais ce préjudice découle du dommage principal subi par CONNECTIC.
La victime principale est CONNECTIC
En vertu de l’article 6, CONNECTIC, en tant que société propriétaire des fonds transférés, est la seule victime directe. Toute réparation devrait donc revenir à la société.
Les Articles 180 à 187 de la Loi sur les Sociétés Commerciales Malgaches
Ces articles encadrent les responsabilités des gérants et les droits des associés :
- Article 180 : Responsabilité des gérants
- Les gérants sont responsables envers la société pour toute faute de gestion. Si un détournement est prouvé, CONNECTIC est prioritaire pour recevoir une réparation.
- Article 181 : Action individuelle des associés
- Les associés peuvent agir individuellement uniquement s’ils prouvent un préjudice distinct et personnel, ce que Ranarison n’a pas fait ici.
- Articles 182 à 185 : Abus de biens sociaux
- Ces dispositions protègent avant tout la société contre les abus, et les réparations doivent lui revenir.
- Articles 186 et 187 : Nullité des actes contraires à l’intérêt social
- Les associés peuvent demander l’annulation d’actes nuisibles uniquement si leurs droits individuels sont directement affectés.
Pourquoi CONNECTIC est-elle la Seule Victime Directe ?
Les fonds transférés à Emergent Network Systems proviennent de la trésorerie de CONNECTIC. Par conséquent, CONNECTIC est la victime directe des virements, et les réparations devraient lui revenir.
Ranarison Tsilavo : Un préjudice indirect
Ranarison, en tant qu’associé, peut invoquer un préjudice indirect, mais ce préjudice ne peut justifier une attribution exclusive des intérêts civils, surtout lorsqu’il a lui-même validé les transactions.
Une Attribution Injustifiée des Intérêts Civils
Pourquoi les intérêts civils ont-ils été attribués exclusivement à Ranarison ?
Cette décision pose plusieurs problèmes majeurs :
- Exclusion de CONNECTIC, la victime principale.
- Les fonds transférés appartiennent à CONNECTIC, et c’est donc elle qui aurait dû recevoir une réparation.
- Ranarison ne détient que 20 % des parts.
- En tant qu’associé minoritaire, il ne peut pas représenter à lui seul les intérêts de la société.
- Solo, l’associé majoritaire (80 % des parts), a été exclu des réparations.
- S’il y avait réellement un préjudice, Solo aurait dû, lui aussi, bénéficier d’une réparation proportionnelle.
Une Décision Qui Pose Question
Une justice en apparence partiale
L’attribution des intérêts civils à Ranarison, malgré son rôle actif dans les virements et sa participation limitée au capital, semble biaisée.
Questions à poser :
- Pourquoi CONNECTIC, propriétaire des fonds, n’a-t-elle pas été reconnue comme victime principale ?
- Pourquoi les intérêts civils ont-ils été attribués à Ranarison, alors qu’il a signé tous les virements et établi les factures associées ?
- Pourquoi Solo, associé majoritaire, a-t-il été exclu des réparations si un préjudice a effectivement été causé ?
Conclusion : Une Décision à Revoir
Les faits sont clairs : CONNECTIC est la véritable victime dans cette affaire.
En vertu de l’article 6 du Code de procédure pénale malgache et des articles 180 à 187 de la Loi sur les sociétés commerciales, les réparations auraient dû être attribuées à CONNECTIC pour compenser les pertes subies. L’attribution exclusive des intérêts civils à Ranarison Tsilavo, malgré son rôle actif dans ces transactions, est juridiquement incohérente et appelle à une révision pour rétablir une justice équitable.